lundi 22 avril 2013

Le nouveau classement des cours d'eau

L'ONEMA et les agences de l'eau ont édité plusieurs plaquettes permettant une meilleure compréhension de ce qu'est le classement des cours d'eau.

Je  vous propose de faire un petit résumé de ces plaquettes et des différents documents qui régissent ces classements. L'article reprend donc en grande partie les textes de l'ONEMA.


1. Historique

Depuis plus d'un siècle, en France, les rivières sont "classées" pour bénéficier de mesures de protection. Le classement est donc un outils réglementaire établi afin de limiter l'impact des ouvrages construits dans les cours d'eau. Ne confondons pas le classement des cours d'eau et la catégorie piscicole.

Quelques dates

Tout d'abord, la fin d'une idée reçue :  la volonté de restaurer la continuité écologique n'est pas récente et le constat de la nécessité d'équiper les barrages en "échelles à poissons" remonte au XIXème siècle. En témoigne ce passage du Bulletin de la Société d'agriculture, industrie, sciences et arts du département de Lozère, de 1861

La première loi date de 1865. 
L’article 1er de la loi du 31 mai 1865 prévoit en effet : « Des décrets du Conseil d’État, après avis des conseils généraux du département, détermineront les parties des fleuves, rivières, canaux et cours d’eau dans les barrages desquelles il pourra être établi, après enquête, un passage appelé échelle destiné à assurer la libre circulation du poisson. » 

Les premiers décrets de classements au titre des "échelles à poissons" datent de 1904, 1905 puis 1920. 

En 1980, afin de développer l'hydroélectricité, une loi allège les procédures d'exploitation MAIS afin de préserver certains cours d'eau, cette loi introduit en même temps le dispositif de classement alors appelé "cours d'eau réservés". Sur ces cours d'eau "réservés", aucune nouvelle centrale hydroélectrique ne peut être autorisée ou concédée.

En 1984 : le constat est celui d'un manque d'efficacité des échelles à poissons. La loi pêche est alors modifiée et y est introduit : 
  • une obligation de résultat et d'entretien constant pour les dispositifs de franchissement
  • une obligation d'aménagement des ouvrages existants dans les cinq ans après la prise d'un arrêté des espèces "cibles".
Jusqu'en 2011, les classements étaient constitués de 2 listes :
  • les cours d'eau réservés, fixés par décret (art 2 loi de 1919) pour lesquels tout nouvel ouvrage à vocation hydroélectrique est interdit .
  • les cours d'eau "classés" par décret (art L432-6 du code de l'environnement) sur lesquels tout nouvel ouvrage doit être équipé d'un dispositif de franchissement des poissons, efficace et entretenu. Tout ouvrage existant doit respecter cette obligation avec un délai de 5 ans à partir de l'arrêté ministériel. 

2. Nouveaux classements, définition

Depuis 2011, face à une situation environnementale préoccupante et pour répondre aux ambitions du Grenelle de l'environnement et à la DCE, une révision de ce classement est en cours : article 6 de la LEMA et article L214-17 du code de l'environnement. Les nouveaux classements entreront en vigueur dès publication des listes. Les anciens classements seront caducs, au plus tard le 1er janvier 2014.

2 listes de cours d'eau en découlent : 
  • Liste 1 : les rivières à préserver
    • rivières en très bon état écologique
    • les réservoirs biologiques (riche biodiversité)
    • les rivières à fort enjeu pour les poissons migrateurs amphihalins (cycle de vie incluant une phase en mer et l'autre en rivière)
=> pas de nouvel obstacle à la continuité autorisé
=> pour les obstacles existants, le renouvellement de la concession est subordonné à un maintien ou à l'atteinte du bon état et de la continuité.

  • Liste 2 : les rivières à restaurer
    • assurer rapidement la compatibilité des ouvrages avec les objectifs de continuité
    • obligation d'assurer le transport des sédiments
    • obligation d'assurer la circulation des poissons, migrateurs, amphihalins ou non. 
=> obligation de mise en conformité des ouvrages dans les 5 ans après la publication des listes
=> mesures d'équipement (passe à poissons, ...) ou de gestion ( ouverture des vannes,...)

Rappel : pour la mise en conformité, les agences de l'eau peuvent compléter les subventions des études et travaux jusqu'à 100% du montant de l'opération. La demande peut être faite par des collectivités mais aussi par des particuliers. 

Les arrêtés sont pris par bassin. Voici par exemple l'arrêté Loire Bretagne, signé le 10 juillet 2012
- cours d'eau de la liste 1
- cours d'eau de la liste 2


3. Exemple de la Touques

La Touques est une rivière normande, classée dès 1924. Là encore, on notera la volonté "ancienne" de rétablir la continuité écologique. Ses affluents sont classés depuis 1999.

Voici une des fiches action menées sur la Touques. Vous y trouverez l'historique, les coûts, le déroulement, les acteurs.  Effacement du barrage-clapet sur la Touques à Lisieux : La fiche est accessible ici.

AVANT
 APRES
Crédit photo : Arnaud Richard et Madeleine Carrouée, ONEMA

Les efforts des acteurs locaux et des services de l'état ont permis des actions sur 71 obstacles : 
  • 33 ouvrages supprimés
  • 38 ouvrages aménagés
Depuis 30 ans, le linéaire colonisé par la truite de mer a été multiplié par 5. La proportion de surfaces accessibles aux salmonidés est passée de 15% avant 1982 à 86% en 2009. 

En 2001 et 2009, le nombre de truites de mer comptabilisées à la passe à poissons de Breuil en Auge est passé de 2500 à 6000. La Touques devient ainsi la première rivière française (voire européenne) pour ce poisson.

Les opportunités en terme de développement touristique et notamment du tourisme pour la pêche sont indéniables.






Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire